Appliquer une optique de genre et de diversité au leadership et à l’entrepreneuriat
Les difficultés rencontrées par les femmes dans le cadre de l’emploi et de l’entrepreneuriat ne relèvent ni du fantasme ni de l’exagération. L’une après l’autre, les études ont confirmé que les préjugés systémiques et les obstacles structurels sont un frein à l’avancement professionnel des Canadiennes, en particulier des femmes de communautés marginalisées, ou à la réussite de leur entreprise.
Wendy Cukier, la directrice du PCFE, a récemment participé au colloque PEI Business Women’s Association Symposium pour mettre en relief l’importance de la diversité au sein des instances dirigeantes, ainsi que la contribution des femmes entrepreneures dans notre paysage économique et nos communautés.
Parrainée par le PCFE, ainsi que par le Diversity Institute et la BDC, le colloque d’une journée organisé par la PEIBWA a été ponctué de présentations dynamiques et enrichissantes, d’exemples de pratiques exemplaires et d’ateliers de développement des compétences, ainsi que d’activités de réseautage pour les femmes entrepreneures de l’île et de la région.
La diversité au sein des instances dirigeantes
Wendy Cukier a commencé sa présentation en dévoilant les conclusions du rapport Diversity Leads 2020 (en anglais), la plus vaste étude menée au Canada sur la diversité au sein des conseils d’administration pour évaluer la représentation des femmes, des personnes noires et des autres personnes racialisées au sein des conseils d’administration du Canada. L’étude a conclu que si la quasi-parité hommes-femmes est atteinte au sein des conseils d’administration du Canada, c’est loin d’être le cas pour les personnes racialisées. Si celles-ci représentent 23 p. 100 de la population des huit villes examinées, seuls 10 p. 100 des administrateurs sondés sont racialisés.
Par ailleurs, la représentation des femmes et des personnes racialisées varie d’un secteur à un autre. Ainsi, si la part des femmes au sein des conseils scolaires, tous postes confondus, s’élève à 47,3 p. 100, elle atteint seulement 25,3 p. 100 dans les conseils d’administration du secteur privé. Dans les universités et collèges, la proportion de personnes racialisées au sein de la direction atteint seulement 14,6 p. 100, et cette part chute à 4,5 p. 100 dans les conseils d’administration du secteur privé. Parmi les 1 639 administrateurs du secteur privé sondés, seules 13 personnes étaient noires (0,8 p. 100).
Mais on observe également des différences notables au sein même des secteurs. À Toronto, 18,9 p. 100 des conseils d’administration du secteur privé comptent au moins 40 p. 100 de femmes, tandis que 5,4 p. 100 n’en comptent aucune. À Vancouver, où près de la moitié de la population est racialisée, 12,8 p. 100 des conseils d’administration du secteur privé comptent au moins 20 p. 100 de personnes racialisées, et 71 p. 100 n’en comptent aucune. Ces données sont incroyablement édifiantes quand on sait que dans certaines villes, les femmes, ou les personnes racialisées, représentent la moitié de la population.
« Les études confirment qu’il ne s’agit pas d’une affaire de talent, qu’il ne s’agit pas d’une affaire de disponibilité, mais qu’il s’agit en grande partie d’une affaire de stratégies et de pratiques conscientes au sein des grands organismes, décrypte Wendy Cukier. Les conseils d’administration représentent le “sommet de la pyramide”. Nous devons tout mettre en œuvre pour ménager à celles et ceux qui se trouvent à la “base de la pyramide” un accès vers ce sommet. »
L’argument en faveur d’un leadership plus inclusif est imparable. En tenant les femmes à l’écart des conseils d’administration, les entreprises risquent de passer à côté des besoins de la moitié de la population. Et à l’heure où les marchés sont de plus en plus inclusifs, l’exclusion des personnes racialisées produit les mêmes effets. La nomination de personnes issues de la diversité au sein des instances dirigeantes peut aider les organismes à élargir leurs débouchés, à mieux servir les consommateurs issus de la diversité, et à prévenir les risques juridiques majeurs ou ceux susceptibles d’entacher leur notoriété.
Soutenir les femmes entrepreneures
Au Canada, 15,6 p. 100 des petites et moyennes entreprises (PME) sont détenues majoritairement par des femmes. Les femmes représentent 37,4 p. 100 de la population de travailleurs autonomes — soit plus d’un million de propriétaires d’entreprises. Selon les résultats d’une recherche menée par le PCFE, ces chiffres ne cessent de s’accroître.
Pourtant, les hommes entrepreneurs demeurent plus susceptibles de recevoir un financement d’investisseurs providentiels et de fournisseurs de capital-risque pour dynamiser leur entreprise. Des études reproduites sous différentes configurations ont montré que les préjugés sexistes orientent les décisions des investisseurs en faveur des hommes, contraignant ainsi souvent les femmes à financer leur entreprise par l’épargne personnelle ou le crédit. Les femmes sont depuis si longtemps victimes de réflexes de rejet et de stéréotypes sociaux qu’elles sont devenues ce que l’on appelle des « emprunteuses découragées », a expliqué Wendy Cukier, et sollicitent moins souvent que les hommes un financement en vue de leur expansion.
Les entreprises détenues par des femmes sont généralement de taille plus modeste et moins bien financées que celles détenues par des hommes. Elles sont également beaucoup plus présentes dans le commerce de détail, les services et l’hébergement. Conjugués à la hausse brutale des besoins en matière de garde d’enfants et d’instruction à domicile, ces facteurs ont rendu les entreprises détenues par des femmes et les femmes entrepreneures plus perméables aux répercussions de la pandémie. L’impact sur les entrepreneurs des groupes marginalisés, y compris les Noirs, les Autochtones et les personnes handicapées, est encore plus marqué.
C’est pourquoi il est crucial que les programmes d’exemption et les plans de relance intègrent et soutiennent les entreprises typiquement dirigées par des femmes entrepreneures si le Canada espère, dans le sillage de la COVID, assurer la pérennité de son paysage économique, sans exclure quiconque.
Wendy Cukier a présenté les travaux menés par le PCFE pour dénoncer et éliminer les obstacles structurels qui compromettent l’avancée des femmes entrepreneures. Ces travaux passent au crible l’écosystème entrepreneurial au travers des prismes du genre et de la diversité. Nous avons compris que les écueils auxquels se heurtent les femmes entrepreneures sont complexes et qu’une approche systémique est nécessaire pour remédier aux problèmes à l’échelle de la société, des organismes et des individus. Le PCFE a mis à profit l’expertise d’un réseau diversifié pour cerner les perspectives d’avenir que les femmes entrepreneures peuvent ouvrir notamment par la voie de la constitution en personne morale (en anglais) et de l’exportation, quelle que soit la taille de leur entreprise.
Meagan Trush, directrice associée responsable des partenariats et des actions d’impulsion au Diversity Institute, a également participé au colloque et présenté le dispositif PCFE/FWE : Plateforme de partage. Au lendemain de l’éclosion de la COVID-19 au Canada, cette plateforme gratuite et bilingue a facilité la mise en relation des entrepreneurs qui s’identifient comme des femmes et des entrepreneurs non binaires avec les organismes qui les soutiennent. Encore aujourd’hui, elle permet aux membres de l’écosystème de tisser des relations fructueuses.
La plateforme est simple à utiliser : Demandez ce dont vous ou votre entreprise avez besoin, et Donnez ce que vous avez pour aider les autres membres. Découvrez comment utiliser la plateforme.